A l’occasion du nouveau cycle de la Fondation Jérome Seydoux-Pathé du 31 août au 27 septembre 2016 consacré aux neuf films muets d’Alfred Hitchcock (dont nous présenterons The Ring et Blackmail (Chantage)), nous vous proposons cette revue de presse des années vingt à l’occasion de leurs sorties (ou non !) à Paris.
Dans une première partie (à lire ici), nous avons évoqués les films suivants : The Mountain Eagle (1926) – The Pleasure Garden (1925) – Champagne (1928) – The Lodger (1927) – The Manxman (1929) – The Ring (1927).
**
Dans cette seconde partie, nous allons donc évoquer les trois autres films muets d’Hitchcock dont nous avons trouvé des traces dans la presse française de l’époque.
Cliquez sur chacun des titres pour lire directement ces coupures de presse :
Farmer’s Wife (1928) – Easy Virtue (1928) – Blackmail (1929) –
*
Bonne lecture !
The Farmer’s Wife (Laquelle des trois ?)
Farmer’s Wife (Laquelle des trois ?) sera donc présenté à Paris à la presse le 26 septembre 28 à l’Empire par Pathé Consortium Cinéma. Puis une fois de plus, le film reste de longs mois inédit jusqu’à sa sortie le 10 mai 1929 et sera projeté couplé avec un autre film de Hitchcock : Le Ring, nous vous renvoyons vers notre précédent post pour plus de détails (à lire ici).
La Semaine à Paris du 10 mai 1929
La première référence à Farmer’s Wife que nous avons trouvé se trouve dans le quotidien Le Matin daté du 27 avril 1928.
Puis dans le numéro du 21 Septembre 1928 de Cinémagazine, on a la surprise de trouver ces trois photographies du film annonçant sa présentation à Paris le 26 septembre à l’Empire.
Cinémagazine du 21 Septembre 1928
Forcément après cette présentation vont paraître plusieurs critiques du film comme celle-ci parue dans Le Matin deux jours plus tard.
LA PRÉSENTATION DU « LAQUELLE DES TROIS ? » A L’EMPIRE
paru dans Le Matin du 28 septembre 1928
Pathé Consortium Cinéma vient de terminer en beauté la première série des présentations de la production de la British International Pictures avec une comédie de l’humour le plus fin.
Laquelle, des trois ? tel est le titre du film dont le scénario est de M. Eden Philpot et la mise en scène du très distingué réalisateur Alfred Hitchcock, dont on a, il y a quinze jours, applaudi le Ring.
L’histoire est charmante, située en Angleterre et, comme il se doit, empreinte du plus bel humour britannique. Le fermier Sweetland, veuf et riche, voudrait se remarier. A cet effet, il dresse, avec l’aide de sa servante, la jolie et dévouée Minta, la liste des personnes d’âge mûr de la région, susceptibles de convoler avec lui. La suffisance de Sweetland est infinie. Il ne doute pas que, dès la première démarche, la personne sollicitée tombe dans ses bras. Mais il commence par essuyer un échec. Cela le rend furieux. Puis, successivement, la seconde et la troisième des candidates qu’il avait choisies déclinent avec le même entrain. Ces scènes sont émaillées des trouvailles les plus drôles et seront accueillies avec d’autant plus de faveur que le fermier finira par trouver l’amour et le bonheur.
Jameson Thomas, Lilian Hall Davis, à la tête de l’interprétation, sont remarquables par le type et la sensibilité. Gordon Harker a créé un valet de ferme inénarrable. Maud Gill, Louie Pound, Olga Slade forment avec diversité les trois grâces un peu flétries, mais bien réjouissantes, de cet excellent film.
Le lendemain c’est au tour du quotidien Comoedia.
LA PRÉSENTATION DU « LAQUELLE DES TROIS ?» A L’EMPIRE
paru dans Comoedia du 29 septembre 1928
Le fermier Sweetland est veuf. Le mariage de sa fille, qu’il célèbre en grande pompe, lui suggère l’idée de remplacer au foyer bien vide désormais feu sa chère femme. Avec l’aide de sa servante, Minta, il établit l’inventaire des épouses possibles. Trois voisines semblent remplir les conditions requises pour prendre au logis la place de la regrettée Mrs Sweetland : Thirza, Louisa et
Mary.
Revêtu de sa jaquette des grands jours, Sweetland commence sa tournée matrimoniale par Thirza. Avantageux, portant avec crânerie ses premiers cheveux gris, Sweetland ne suppose pas un seul instant que sa demande ne soit agréée. Cependant, Thirza refuse. Un nom rayé sur sa liste, et Sweetland se présente chez Louisa. Second échec !
Diable ! Les affaires vont mal. Essayons la troisième. Même résultat négatif.
Sweetland est pris entre la fureur et le dépit. Minta le console. Tout n’est pas perdu. Il y a bien de par le monde une femme qui serait fière de s’appuyer sur le bras du fermier.
Oui, mais où la trouver ? Sweetland cherche, cherche encore et trouve enfin. Sur la fameuse liste rayée de coups de crayon furieux, Sweetland écrit un nom.
Qu’en pense Minta? Il lui passe le papier et la servante rougit de confusion et de bonheur en épelant les deux syllabes de son nom.
Ce n’est rien que cette intrigue simplette, mais c’est charmant. Alfred Hitchcock, dont la mise en scène du Ring fut justement admirée, a réalisé une œuvre pleine de fraîcheur et d’humour.
On dirait d’une de ces savoureuses histoires à la Dickens, où le comique savoureux des détails n’empêche pas l’émotion de fleurir.
Et quel cadre charmant ! Vous connaissez ces vieilles estampes anglaises sur lesquelles on voit des cottages aux murs couverts de lierre, leur cour toute éveillée par l’aboi des chiens de chasse et le piaffement des pur-sang ; au loin, se devine la campagne anglaise aux lignes molles relevées çà et là de bouquets d’arbres verts.
Paysage tout empreint de la douceur d’une vie saine et ensoleillée.
Eh bien ! on ressent la même impression réconfortante en contemplant les magnifiques extérieurs de Laquelle des trois ? Et c’est délicieux.
Cette œuvre charmante est jouée à la perfection par une troupe d’acteurs excellents, à la tête de laquelle il convient de placer Jameson Thomas et Lilian Hall-Davis, tous deux parfaits de naturel et de simplicité. Les autres interprètes, Maud Gill, Louise Pounds et Olga Slade (Thirza, Louisa et Mary) ont composé magistralement les silhouettes des trois commères. Gordon Harker joue avec un comique parfois outrancier le rôle d’un garçon de ferme.
René Lebreton
Finalement c’est au tour de Cinémagazine de publier à son tour sa critique du film début octobre 1928.
Critique du film LAQUELLE DES TROIS ? (The Farmer’s Wife)
paru dans Cinémagazine du 05 octobre 1928
Une histoire très attrayante nous est présentée sous ce titre. Elle se passe en Angleterre et est teintée de cet humour britannique, froid et incisif. Un fermier, Sweetland, a décidé de se remarier. A cet effet, il cherche parmi ses relations quelle femme pourrait se trouver digne de ses faveurs ; et il en retient trois. Il se met en route, persuadé que, dès qu’il parlera, la victime, charmée, tombera dans ses bras. Il n’en est rien. Les trois grâces déclinent cette invitation au voyage. Alors, furieux il rentre chez lui, où il retrouve sa servante qui l’aime d’amour tendre. Sa fureur tombera et il s’apercevra que lui aussi devait l’aimer depuis longtemps déjà.
Film très amusant. L’interprétation en est excellente avec Jameson Thomas, Lilian Hall-Davis et Gordon Harker qui est un valet de ferme extraordinaire. Louise Pound, Olga Slade et Maud sont les trois candidates réfractaires. Louons Alfred Hitchcock pour sa mise en scène soignée et la perfection de son montage.
Robert Mathe
Malgré ces critiques élogieuses, Farmer’s Wife ne sortira à Paris que de longs mois plus tard comme nous l’avons écrit, le 10 mai 1929 donc. Heureusement Cinémagazine publie à cette occasion une nouvelle critique du film.
Critique du film LAQUELLE DES TROIS ? (The Farmer’s Wife)
paru dans Cinémagazine du 10 mai 1929
Pour se remarier, un fermier songe à trois femmes. Est-il besoin d’ajouter que c’est une quatrième qui emportera ce tournoi d’un nouveau genre ? Le film est très amusant, et exploite un sujet assez nouveau : l’amour à quarante ans, l’amour sans passion, petite fleur bleue sans drame, et ce n’est pas le moindre mérite de cette réalisation que de nous intéresser à une histoire d’une ligne extrêmement simple.
L’humour britannique éclaire le film d’une lueur froide, presque rigide, à l’image même de Jameson Thomas, qui fait là une très bonne composition d’un gentleman-farmer bien hésitant, mais peut-on être longtemps indécis devant la grâce de Lilian Hall-Davis ?
L’Habitué du Vendredi
***
Le passé ne meurt pas (Easy Virtue)
Nous avons déjà écrit que l’année 1929 voit la sortie à Paris de plusieurs films d’Hitchcock. Signalons que Easy Virtue ( Le Passé ne meurt pas) a été produit par la Gainsbourough Pictures, avec qui Hitchcock a travaillé entre 1925 et 1927. Sorti en Angleterre avant Le Ring mais en France après.
*
Le film est présenté le 30 mai 1929 par les Films Métropole aux Folies-Wagram, 35 avenue Wagram à Paris.
Comoedia du 30 mai 1929
Du coup dans la foulée paraissent les articles suivants dans Comoedia, Pour Vous et Cinémagazine.
Critique du film Le passé ne meurt pas (Easy Virtue)
paru dans Comoedia du 3 Juin 1929
Le fils de lord Whittaker a épousé une belle étrangère dont il avait fait la connaissance sur la Riviera ; ses parents, qu’il n’a consultés que pour la forme, crient à la mésalliance.
Un jour, la sœur du jeune John Whittaker découvre que la femme de son frère n’est autre que Larita Filton dont la renommée fut, jadis, fâcheusement entachée par une histoire passionnelle. La famille de John exploite contre l’intruse cette découverte.
Larita comprend que le passé ne meurt pas et elle se résigne à demander le divorce quelle que soit l’affreuse peine que cause à son cœur aimant cette décision courageuse.
Comme scénario, il est difficile de trouver plus simple. Ici, la simplicité n’exclut pas l’intérêt dramatique de la situation dans laquelle se débat la malheureuse femme qui, sur l’horizon de son calme avenir, voit se lever le spectre du passé.
Bonne mise en scène du réalisateur anglais Alfred Hitchcock et interprétation homogène fournie par de bons éléments anonymes.
René Lebreton
Critique du film Le passé ne meurt pas (Easy Virtue)
paru dans Pour Vous du 6 Juin 1929
Alfred Hitchcock, qui n’en est pas à son premier film, a mis à l’écran une pièce de théâtre en donnant trop peu de force à ses images. Sans doute encadre-t-il plus d’une fois l’action dans des paysages agréables, mais il n’a pas réussi à éviter suffisamment le dialogue. On sent que la parole commande l’intrigue et c’est d’autant plus regrettable que le sujet, fort simple, n’est pas bête.
Un jeune lord épouse une femme dont il ne connaît pas tout le passé. Il l’emmène ensuite dans sa famille, où, par une photographie insérée dans un vieux numéro d’un magazine, on découvre que cette personne a été mêlée à un scandale. Un peintre qui la courtisait et son mari ont eu une altercation mortelle et elle a été accusée, puis acquittée. Elle souffrait déjà de l’atmosphère rigoriste qui pesait sur la maison de sa belle-mère ; maintenant, elle est obligée de partir… après divorce. Le jeune lord se mariera certainement avec une demoiselle de son monde, que nous avons aperçue.
Il fallait parvenir à composer précisément l’atmosphère particulière de ce monde-là, il fallait aussi, pour l’évocation du crime et surtout pour celle du jugement, donner une impression de désespoir. Les mots jouent là un trop grand rôle et les interprètes ne sont que suffisants.
Et, une fois encore, déplorons des fautes d’orthographe, par exemple : « … Un homme qui ne vous comprends pas. »
— W (Lucien Wahl)
Critique du film Le passé ne meurt pas (Easy Virtue)
paru dans Cinémagazine du 7 Juin 1929
Il y a dans la pièce de Noël Coward, d’où le film est tiré, une satire violente contre la bourgeoisie anglaise et un cas superbe de conscience, la fatalité qui s’acharne sur l’héroïne, la faute qui jadis a entaché sa vie et qui lui interdit de refaire son bonheur, cette femme qui sort du tribunal et qui, ayant aboli toute fierté et toute pudeur morale, ne songe même plus à se dérober aux indiscrétions des photographes et des journalistes, tout cela formait, en dehors du verbe même, un ensemble extrêmement cinématographique.
Il faut féliciter Alfred Hitchcock, un des meilleurs réalisateurs anglais, de ne pas avoir déformé la pensée du dramaturge. Avec des moyens sobres, sachant se hausser dans certaines scènes au pathétique, il est parvenu, bien secondé par une excellente interprétation, à nous émouvoir d’une très noble façon.
Robert Vernay
Puis, une fois de plus le film sort plusieurs mois plus tard. Nous retrouvons sa trace brièvement la semaine du 29 novembre 1929 à l’American Cinéma, 23 boulevard de Clichy.
La Semaine à Paris du 29 novembre 1929
A cette occasion la revue Photo-Ciné publie cette critique.
Critique du film Le passé ne meurt pas (Easy Virtue)
Photo-Ciné n°21 d’octobre 1929
Les Films Métropole présentent : « Le Passé ne meurt pas ».
Un film réaliste, dont le sujet est poignant. C’est le calvaire d’une femme que le réalisateur Alfred Hitchcock nous a conté.
Larita Filton a épousé un jeune lord de la plus haute aristocratie anglaise. Ses beaux-parents qui espéraient une plus belle union pour leur fils tiennent Larita à l’écart. Un jour, un coin du voile cachant le passé de la jeune femme se soulève : on apprend ainsi qu’elle fut autrefois la malheureuse héroïne d’un scandale. Le passé qu’elle croyait à jamais oublié reparaît comme un juge, un accusateur. Il lui faut donc quitter l’homme qu’elle aime et s’éloigner pour toujours du foyer, du « home », qu’elle avait cru trouver…
Mise en scène très sobre et émouvante.
Les interprètes de ce film vivent leur rôle plus qu’ils ne le jouent. Ceux qui incarnent les parents du jeune lord sont remarquables par l’art de la composition, dont ils font preuve.
Louis Saurel
Puis le film est projeté plusieurs fois au long de l’année 1930 dans des salles de quartier à Paris. Voici deux exemples :
La Semaine à Paris du 10 janvier 1930
La Semaine à Paris du 06 juin 1930
**
Blackmail
Blackmail ou Chantage en français est le premier film parlant d’Alfred Hitchcock. Sorti en Angleterre au mois de juillet 1929, il a été tourné tout d’abord en version muet puis quelques scènes ont été retournées en parlant. La presse française se fait l’écho du tournage du film à plusieurs reprises ainsi qu’à sa sortie londonienne. Pourtant le film ne sortira pas en France ! Nos recherches se sont avérées infructueuses malheureusement. Pour quelles raisons ? mystère…
Nous avons trouvé une première référence à Blackmail dans le quotidien Le Journal daté du 9 novembre 1928.
Nous trouvons la même dépêche dans Paris-Soir du 12 novembre 1928
Puis plusieurs mois plus tard Paris-Soir publie cet encart concernant le tournage du film en cours à Londres.
Paris-Soir du 23 mars 1929
Quinze jours plus tard, Paris-Soir publie ce nouvel encart à propos de ce tournage et précise qu’Hithcock tourne quelques scènes à Convent Street Corner House, qui est sans doute le Lyon’s Corner House qui se trouve à Coventry Street.
Paris-Soir du 06 avril 1929
Finalement le 14 juin 1929 parait dans Cinémagazine, au détour d’un article sur les tournages à Londres, cette phrase concernant Blackmail.
(…) On attend avec impatience Blackmail, d’Alfred Hitchcock, car le directeur sait son métier de metteur en scène, et, bien qu’il ne nous ait jamais fait tressaillir par une œuvre d’art, cependant il ne nous a jamais ennuyés par un film destiné à être artistique. Tous les tableaux sont bien montés et très populaires auprès des exhibiteurs.
Oswell Blakeston
Enfin sort dans Cinémonde le 8 août 1929 cette pleine page consacrée à la sortie du premier parlant britannique, Blackmail.
Critique de Chantage (Blackmail)
paru dans Cinémonde du 8 Août 1929
(De notre correspondant particulier à Londres)
II était bien près de minuit quand le premier film parlant de la British International, Blackmail (Le Chantage) fut présenté devant trois mille spectateurs au New Regal Théâtre. Mais quelle brillante assemblée ! Stars et metteurs en scène se trouvaient mêlés avec un public select. J’étais, moi-même, à côté de M. John l.ongden qui interpréta le principal rôle de ce film ; il était accompagné de sa charmante et talentueuse femme. Miss Jean Jay, que l’on a vu récemment dans plusieurs films anglais. Quelques rangs derrière nous, se trouvaient M. Harry Lachman, metteur en scène, avec sa femme, qui est une Chinoise d’une grande beauté. Assis près d’eux, était M. Carl Brisson ; il tient actuellement le principal rôle dans le film que l’on tourne à Elstree, American Prisoner. M. Alfred Hitchcock, le metteur en scene de Blackmail , se trouvait, naturellement, en évidence avec d’autres personnalités marquantes du monde du cinéma.
Blackmail est une adaptation assez libre de la pièce de Charles Bennett, drame policier qui met en relief l’activité de Scotland Yard. M. Hitchcock, avec beaucoup de talent, a fait de ce film un excellent talkie, le meilleur sans doute que nous ayons eu jusqu’à présent. Cela tient surtout à ce qu’il n’a pas sacrifié le film lui-même au dialogue. Il n’a mis de phrases que lorsque cela était nécessaire, sans ralentir l’action et en laissant aux images toute leur force d’expression, telles qu’elles seraient sur l’écran silencieux. Il faut féliciter les excellents acteurs de ce film : Miss Anny Ondra, John Longden, Donald Cathrop et Cyril Richard. Toute l’interprétation est digne d’éloges.
Ces voix sont singulièrement agréables à entendre après le nasillement de tant de films américains.
M. Cathrop, qui joue le rôle du « villain », avec juste raison, remporté les honneurs de la soirée.
La présentation se termina aux premières lueurs du matin et cependant les spectateurs ne se montrèrent nullement fatigués pour applaudir cette excellente production qui peut être égalée aux meilleurs films américains et qui, peut-être même, les surpasse. Ce fut, en vérité, une charmante soirée ou, plus exactement, une délicieuse matinée.
Pat Henry
Nous trouvons dans Le Matin du 16 août 1929 cette photo promotionnelle d’Anny Ondra .
Puis, et c’est la seule mention d’Hitchcock dans cette revue prestigieuse, Cinéa au détour d’un article intitulé “voyage d’études à Londres des exploitants français” nous trouvons les propos suivants rapportés dans la revue Bordeaux-Ciné par Mme Nadine Daniloff (dont le mari dirige la société de distribution Pax-Film)
Cinéa du 15 novembre 1929
(…) Blackmail (Chantage), film parlant de la British International (procédé américain R.C.A. Photophone) a ensuite été visionné.
« Chantage, déclare Mme Daniloff, est un film parlant enregistré sur appareils R.C.A. Il est interprété par Anny Ondra. Présenté en Allemagne, il a été très mal accueilli. Il est entièrement parlant ce qui ralentit beaucoup l’action. L’intrigue serait assez intéressante, mais les décors souffrent de la médiocrité que je vous ai déjà signalée. Dans Chantage, nous avons revu les vilains meubles démodés. Dans un atelier d’artiste, nous trouvons un fauteuil gothique et une cheminée digne de figurer dans le cabinet du docteur Faust.
« En ce qui concerne la partie sonore, on doit remarquer que la technique n’est pas au point. On ne connaît pas encore exactement la phonogénie des différents sons, ce qui fait qu’à la reproduction les valeurs ne sont pas respectées. Des bruits légers sont enflés démesurément tandis que des bruits plus forts paraissent diminués. ”
Pour finir, au détour d’un autre article paru dans Cinémagazine le 20 décembre 1929 et intitulé “impressions londoniennes”, nous trouvons les propos suivants :
(…) La production anglaise est très restreinte (à la British International, il y avait, sur six films, un français, avec Robert Florey, un allemand, avec Eichberg, un américain, avec Elinor Glyn, et un anglais indépendant, avec Monty Banks, les deux autres metteurs en scène, Hitchcock et Lachmann, travaillant pour la maison) et ne semble pas devoir s’imposer par sa quantité ou sa qualité.
A part Blackmail (Chantage) qui demeure comme le premier grand succès du talkie, et qui d’ailleurs le mérite, il n’y a d’autre film qui dure en exclusivité que White Cargo, sur lequel je vais revenir.
Le curieux, dans Blackmail, est que le film a été entièrement tourné silencieux avec, toutefois, un dialogue strictement déterminé à l’avance. Les paroles furent ensuite enregistrées, mais je défie qui que ce soit de voir que ce n’est pas Anny Ondra, Autrichienne, qui parle, tant le double anglais (le ghost, comme on l’appelle là-bas, le fantôme) a, dans la synchronisation, exactement suivi l’inflexion des lèvres de l’image muette. Le scénario est d’ailleurs remarquable de simplicité et admirablement traité. (…)
Jean Berlin
**
En bonus, nous vous proposons cet entrefilet paru dans Cinéa du 1 octobre 1929, évoquant le projet d’un film dont la version française serait tourné par Louis Mercanton et la version anglaise par… Alfred Hitchcock ! Il doit s’agir du film Le Mystère de la villa rose dont la version anglaise sera réalisée par Leslie S. Hiscott.
***
Source : Bibliothèque numérique de la Cinémathèque de Toulouse (Pour Vous)
Source : Ciné-Ressources / La Cinémathèque Française (Cinémagazine, Photo-Cine)
Source : Collection personnelle Philippe Morisson (Cinémonde)
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France (les autres revues)
***
Pour en savoir plus :
The Alfred Hitchcock Wiki est une vrai mine d’or pour tout admirateur d’Alfred Hitchcock.
Comme nous aimerions qu’un tel site existe pour un réalisateur français…
Le site français sur Alfred Hitchcock, qui date un peu mais fourmille de renseignements sur sa carrière.
La scène du meurtre dans la version muette de Blackmail.
La scène du couteau dans la version parlante de Blackmail.
L’extrait de l’entretien d’Alfred Hitchcock avec François Truffaut dans lequel il parle de Blackmail.
Le fameux essai parlant d’Alfred Hitchcock avec Anny Ondra pour Blackmail.
Cet extrait provient de l’excellente émission “Cinéma Cinémas” rediffusée sur France 4.
La scène du couteau dans Sabotage avec Sylvia Sydney en 1936 à rapprocher de celle de Blackmail.
Un extrait de Farmer’s Wife (Laquelle des trois ?)