L’Invention du Cinématographe (I), texte des frères Lumière (Cinémagazine 1924) 1 commentaire


 C’est dans le numéro 14 daté du 04 avril 1924 que paraît dans la revue Cinémagazine ce texte des frères Lumière concernant leur invention du Cinématographe.

Ce courrier va déclencher une série de débats contradictoire passionnés (sur fond de rivalité entre les partisans de Etienne Marey et des Frères Lumière) dans les quatre numéros suivants de Cinémagazine, articles que nous publierons prochainement.

A suivre.

Texte des frères Lumière dans Cinémagazine 1924

Texte des frères Lumière dans Cinémagazine 1924

L’Invention du Cinématographe par les frères Lumière

MISE AU POINT : L’Invention du Cinématographe

On sait que certains membres de l’Académie de Médecine ont dernièrement contesté aux Frères Lumière la paternité du cinématographe en attribuant au Dr Marey le mérite de cette invention. Nous publions ci-dessous une déclaration de MM. Auguste et Louis Lumière qui remet les choses au point :

Nous nous étions promis de ne jamais intervenir dans les questions touchant à l’histoire de la création du cinématographe et de laisser aux écrits authentiques de l’époque de cette invention le pouvoir de fixer la vérité historique. Mais la controverse qui vient de se produire a provoqué parmi nos nombreux amis des protestations et une pression telles que nous nous décidons à rompre le silence que nous nous étions imposé.

Nous nous permettrons tout d’abord d’exprimer notre étonnement d’avoir été jugés par l’Académie de Médecine sans avoir été entendus alors, pourtant, que l’un de nous appartient à cette Compagnie savante au titre de Correspondant national. Quoi qu’il en soit, on semble oublier qu’une vue de l’esprit, un désir de réalisation, ne sauraient constituer une invention et que seule compta la réalisation elle-même. S’il en était autrement, qui ne prendrait chaque jour des brevets par dizaines ?

Notre grand et regretté ami Marey, dont nous sommes les premiers à admirer les impérissables travaux, s’est obstiné, jusqu’à la fin de sa vie, à la réalisation d’une utopie, pour ce qui regarde la projection d’images animées, en écartant systématiquement l’emploi de bandes perforées. Un telle manière de voir était diamétralement opposée à la nôtre et nous pouvons affirmer que le cinématographe Lumière est né, non pas grâce à Marey mais à l’encontre des principes dans lesquels il s’était systématiquement cantonné.

Nous avons eu maintes fois l’occasion d’en discuter affectueusement avec lui, notamment au cours des visites qu’il nous fit à Lyon, postérieurement à 1895, pour nous faire apprécier en sa présence, dans nos laboratoires mêmes, les perfectionnements successifs qu’il apportait, mais vainement, à ses appareils, ainsi qu’en témoigne la lettre suivante qu’il nous adressa à la date du 18 août 1899, au retour d’une de ses visites :

« Chers Messieurs et Amis, je regrette que vous n’ayez pas cru devoir exploiter mes appareils, j’aurais été heureux d’entrer avec vous en relations plus intimes. Mais je comprends
vos motifs ; peut-être un jour réussirai-je à vous intéresser avec un autre appareil. Je vous suis très reconnaissant du généreux concours que vous voulez bien prêter aux travaux de la Station Physiologique. Les 10.000 francs que vous voulez bien lui attribuer seront immédiatement employés. »

D’autre part, nous ajouterons qu’aucune protestât on, ou contestation d’aucune sorte, ne s’est jamais fait jour pendant toute la durée légale des brevets que nous avions pris en 1895 dans tous les pays du monde. Et n’est-il pas singulier de constater que c’est après trente années que l’on vient contester notre priorité ?
La vérité serait-elle donc soumise à la prescription ?

Marey a, en maintes circonstances, reconnu cette priorité en notre faveur, notamment en 1897 (Congrès des Sociétés savantes à la Sorbonne, page 140 du compte rendu) :
« Auguste et Louis Lumière ont, les premiers, à réalisé ce genre de projections avec leur cinématographe. »
En 1899 (Bulletin de la Sté Française de Photographie, page 275) :
« …A cause de ces inconvénients, le kinétoscope fut bientôt supplanté par l’admirable instrument de MM. Lumière, universellement connu sous le nom de cinématographe et qui était la réalisation parfaite du chronophotographe projecteur. »
En 1900, rapport de Marey sur le Musée Centenal à l’Exposition Universelle :
« …Cet instrument (cinématographe Lumière) donna enfin la solution cherchée, c’est-à-dire la projection sur un écran d’images animées visibles par un nombreux public et donnant l’illusion parce faite du mouvement. Le succès de cette invention fut immense et ne s’est pas ralenti. »
Enfin, Exposition 1900, Rapport du Comité de la Classe 12, Marey, Président:
« …Par une série d’inventions, d’améliorations, de modifications successives, MM. Lumière Frères ont transformé les méthodes et les appareils. Ils ont créé le cinéma. »

De telles déclarations ne sont-elles pas péremptoires ?
Personnellement, nous considérons qu’elles constituent un jugement précis et définitif, et elles nous suffisent.

Auguste et Louis LUMIÈRE.

photographie des frères Lumière (Cinémagazine 1924)

photographie des frères Lumière (Cinémagazine 1924)

Source : Ciné-Ressources / La Cinémathèque Française

Cet article était en fait paru précédemment dans le quotidien Comoedia daté du 24 mars 1924 dont voici la reproduction ci-dessous.

comedia-lumiere-1924

Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

Pour en savoir plus :

Le Cinématographe Lumière sur la page de l’Institut Lumière.

Le contexte historique du Cinématographe Lumière sur le site L’Histoire par l’image.

L’exposition au Grand Palais : Lumière ! Le cinéma inventé (27 Mars 201514 Juin 2015).

« Mémoire des Frères Lumière, les souvenirs du petit-fils de Louis » sur le site Culturebox.

Une page sur le rapport entre Etienne Marey et le cinéma sur le site de la Cinémathèque Française.

 

 


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