Le premier festival de Cannes (Pour Vous 1939)


C’est dans le numéro 562 daté du 23 août 1939 de la revue Pour Vous que paraît cet article à propos du premier Festival de Cannes.
Festival qui n’aura pas lieu à cause de la déclaration de guerre le 3 septembre 1939.

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CANNES,  1-20  SEPTEMBRE 1939 : Pour la première fois, la France organise le Festival International du Film.

S’il fallait encore faire la preuve de l’intérêt exceptionnel que présentera le Festival International du Film, qui va se dérouler à Cannes, il suffirait, sans aucun doute, de rappeler que la production américaine — qui demeure la plus considérable du monde — a décidé de réserver sa participation à cette seule manifestation, pour en mesurer toute l’importance.
Tous les pays producteurs de films ont été invités, par les soins de notre ministère des Affaires étrangères, à participer à ce festival, qui ne peut qu’aider au développement de l’art cinématographique sous toutes ses formes et — surtout au moment où la France vient de supprimer le contingentement pour l’importation des films étrangers — créer, entre tous les pays, un véritable esprit de collaboration! Et si certaines puissances n’ont pas cru devoir accepter cette invitation, la participation — outre les Etats-Unis et, bien entendu, la France — de la Grande-Bretagne, l’U.R.S.S., la Belgique, la Suède, la Pologne, l’Egypte, la Hollande, le Luxembourg… suffit, non seulement à assurer le succès du Festival de Cannes, mais à en faire, sans discussion possible, la plus importante manifestation internationale du cinéma.

La compétition s’élargit et devient internationale pour les techniciens du film : la Coupe Louis-Lumière, que l’on considérera sans doute comme la récompense suprême de ce Festival, sera attribuée au meilleur metteur en scène. D’autres prix iront aux meilleurs interprètes, féminin et masculin, au meilleur scénario, à la meilleure partition, au meilleur opérateur, et compléteront, significativement, ce palmarès.
En outre, seront en compétition : le Grand Prix international du documentaire de long métrage ; le Grand Prix international du dessin animé de long métrage.
Les films de court métrage se disputeront des grands prix attribués au film documentaire, au film scientifique, au film pédagogique, au film d’actualité, au dessin animé.

Les films qui ont été choisis pour représenter les différentes productions nationales commencent à être connus : on sait que, sur la proposition de la Commission du Cinéma, M. Jean Zay, ministre de l’Education nationale et président du Festival international du Film, a arrêté, comme suit, la liste des films français qui connaîtront, pour leur première présentation, une consécration officielle :

L’Homme du Niger, réalisation de Jacques de Baroncelli, avec Harry Baur, Victor Francen, Annie Ducaux, Jacques Mauloy et René Dumesnil ;
La France est un empire, documentaire de long métrage ;
L’Enfer des anges, réalisé par Christian Jaque, d’après un scénario de Pierre Véry, interprété par Dorville, Jean Tissier, Bergeron, Serge Grave, Claudio, Mouloudji, Louise Carletti et Fréhel ;
La Loi du Nord, adaptation cinématographique du roman de Constantin-Weyer : Telle qu’elle était de son vivant. Mise en scène de Jacques Feyder, avec Michèle Morgan, Pierre Richard-Willm, Charles Vanel, Jacques Terrane et Arlette Marchal ;
La Charrette fantôme, réalisé par Julien Duvivier, avec Louis Jouvet, Valentine Tessier, Pierre Fresnay et Marie Bell.
Voici, par ailleurs, les films de court métrage qui ont été retenu :
Observations cinématographiques sur le soleil, réalisation de Bernard Lyot :
Montage collectif de la revue du 14 juillet 1939 (réalisation de la Chambre syndicale de la Presse) ;
Illustration d’une leçon sur la métallurgie du fer, de Marc Cantagrel et Fernand Meyer ;
L’Ame de la Corse, réalisé par M. Taurier ;
Rouen, naissance d’une cité, de Louis Cuny ;
Deux Empires, une force, dessin animé de la série des « trois minutes ».

Les Etats-Unis présenteront, entre autre, œuvres importantes :
Le Magicien d’Oz, film de féerie ; Stanley et Livingstone, avec Spencer Tracy et sir Cedric Hardwicke ; Union Pacific, la dernière réalisation de Cecil B. de Mille ; Bachelor Mother, avec Ginger Rogers, qui paraîtra sous le titre Mademoiselle et son bébé ; un numéro de La Marche du temps sur l’histoire du cinéma ; trois Walt Disney inédits, etc.

La Grande-Bretagne sera représentée notamment par Good Bye, Mr. Chips, où Robert Donat a fait une saisissante création de professeur de collège, et Les Quatre Plumes blanches, de Zoltan Kordan.

L’U.R.S.S. présentera :
Films de long métrage : Conducteurs de tracteurs, réalisation de I. Pyriev ; Lénine en 1918, de Mikaïl Romm ; Si demain c’est la guerre, tourné par une équipe de cinéastes sous la direction de E. Dzigane ; A la frontière, de A. Yvanov ; Films de court métrage : Le Kolkhoze Octobre rouge, de B. Weiland ; Samarkande, documentaire en couleurs, de Largarov ; La Santé publique au pays des Soviets, de R. Appel ; enfin La Jeunesse en marche, de F. Fisselev et M. Sloutsky.

La Suède :
Un film de long métrage : Nous deux (Vi-Tva), de R. Hylten-Cavallius, et un de court métrage : Le Gulf-Stream, calorifère de l’Europe du Nord, réalisé par le savant suédois J-W. Sandstrom.

La Hollande :
Films de long métrage : Boefjé, de Detlef Sierck, et Vadortje Lang’teen, de Friedrick Zelnik ; Films de court métrage : Ok zal Handhavne (documentaire) ; South sea sweeethearts et Aladin and the magic lamp, deux dessins animés de George Pal ; un documentaire non encore titré réalisé par J-C. Mol.

Le Grand-Duché de Luxembourg :
Deux films de court métrage signés par René Leclère : La Chanson de l’eau (documentaire), et Circulez (film pédagogique).

La Belgique :
Magie africaine, documentaire de long métrage réalisé par Armand Denis ; Memling, peintre de la Vierge, court métrage d’André Cauvin ; L’Acier, court métrage de Charles Dekeukeleire et Lucien Deroisy.

Durant ces trois semaines, du 1 au 20 septembre, où ce festival va se dérouler dans un des cadres les plus beaux du monde, devant un public des plus élégants et qui comprendra, bien entendu, les vedettes les plus brillantes et les personnalités les plus marquantes du cinéma international, outre les galas purement cinématographiques, un important programme de fêtes a été prévu.

Tout d’abord l’inauguration du Festival, le 1 septembre, sous la présidence du ministre de l’Education nationale ; puis, le 4 septembre, la Nuit du Cinéma, qui aura lieu au Casino de Juan-les-Pins ; le 9 septembre, le Dîner de l’Elégance au Palm Beach de Cannes ; le 13 septembre, le Souper de Mimi Pinson, à Juan-les-Pins ; enfin, la cérémonie de clôture, véritable apothéose du Festival, qui, après la remise officielle des récompenses, se déroulera au Palm Beach de Cannes.

Jean-Pierre BARROT

Et dans le numéro suivant (563) apparaît cet encart :

LE FESTIVAL DE CANNES est ajourné
Le ministère de l’Education nationale et des Beaux-Arts communique :
« L’ouverture du Festival international du cinéma, qui devait avoir lieu à Cannes le Ier septembre, est ajournée et sera reportée au 10 septembre si les circonstances le permettent. »

L’ajournement de l’ouverture du Festival de Cannes nous oblige à ajourner également la publication du numéro spécial de « Pour Vous » qui devait paraître la semaine prochaine et qui devait être consacré à cette importante manifestation cinématographique.

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Source : Bibliothèque numérique de la Cinémathèque de Toulouse

Pour en savoir plus :

L’histoire du Festival de Cannes sur le site officiel du Festival de Cannes.

La naissance du premier Festival de Cannes sur le site officiel de la ville de Cannes.

La genèse et la première édition annulée du Festival de Cannes sur Wikipédia.

l'affiche du premier Festival de Cannes en 1939 créé par Jean-Gabriel Domergue.

l’affiche du premier Festival de Cannes en 1939 créé par Jean-Gabriel Domergue.

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